Rien n'a changé. Les putes sont toujours à un bout de ma rue, le tram à l'autre. Il y a toujours cette punk qui fait la manche devant le distributeur de tickets, cette petite mamie qui fait ses courses au Simply. Les bordelaises sont toujours toutes habillées pareil, et je ne fais pas exception à la règle. Les gens disent "gavé" tous les trois mots et c'est tout à fait normal, personne ne fronce le sourcil quand je dis que pour la poche, c'est pas la peine merci, et tout le monde connaît la différence entre un pain au chocolat et une chocolatine.
Rien n'a changé. Il y a bien un Apple Store qui ouvrira bientôt rue Ste-Catherine, l'immeuble accolé au Gaumont de Forum qui est fini, et les vitrines des boutiques qui sont remplies d'oeufs en chocolat au lieu de guirlandes de Noël, mais globalement, la ville est la même, ma ville est la même, mes restaus et bars préférés n'ont pas bougé, mon McDo est toujours là, d'ailleurs je dis toujours "mon" McDo, et même si je ne suis pas allée vérifier, je suis sûre que la fac a absolument la même tête qu'il y a trois mois.
Rien n'a changé. J'ai toujours aussi mal aux abdos (et aux jambes) après une après-midi avec Camille, je ne tiens toujours plus l'alcool mais en fait je suis vachement sage, je ne bois plus tellement donc c'est pas grave, on fait toujours les magasins aux mêmes endroits et les photos aux mêmes autres, le petit arabe qui me coupe la frange est toujours aussi délirant.
Non, rien n'a changé, ou presque. C'est peut-être la perspective de tirer définitivement un trait sur cet appartement où j'ai vécu deux ans, celui où je suis presque restée le plus longtemps, c'est peut-être tourner la page d'une histoire, c'est peut-être la fin de tellement de choses. Je ne sais pas. C'est peut-être moi, tout simplement, j'ai peut-être déjà beaucoup changé en trois mois. Mais tout me paraît tellement bizarre que je me sens à côté de la plaque. Je suis passée du rire aux larmes tout le week-end, et même si j'avais de bonnes raisons, j'ai du mal à assumer pour une fois. Ca ira sans doute mieux la prochaine fois, quand mon avenir sera un peu moins flou, quand les copains seront un peu moins en partiels, quand le chou sera un peu moins loin. Ou pas.
Après tout, rien n'a vraiment changé, ma vie a toujours un gros bordel et j'ai toujours aimé ça.
- 21:45
- 5 Commentaires